Le secrétaire général de Hotel & Gastro Union tire un bilan de l’année écoulée et porte un regard pertinent sur l’évolution du secteur de l’hôtellerie-restauration.
Urs Masshardt, quels sont les défis que vous avez dû relever au cours des 12 derniers mois à la tête de Hotel & Gastro Union?
Dans un contexte marqué par les défis économiques et les incertitudes liées à la conjoncture, nous nous sommes penchés sur les processus internes de notre organisation. C’est ainsi que nous avons lancé le projet Futuro, qui a pour objectif de renforcer nos cinq sociétés professionnelles en leur permettant d’avoir plus d’influence et de responsabilités au sein de Hotel & Gastro Union. Ces dernières jouiront ainsi d’une plus grande marge de manœuvre pour déployer leurs activités et proposer des contenus plus intéressants encore à l’attention de leurs membres.
Cette démarche vise-t-elle à attirer de nouveaux membres?
Oui, car nous voulons jouer dans la cour des grands en matière de politique professionnelle. Dans cette optique, nous avons besoin d’une équipe forte et d’un soutien plus large au sein de notre branche. C’est un peu comme au football: on peut entrer sur le terrain avec une équipe modeste lors de tournois régionaux ou d’une ligue amateur, mais pas en Ligue des champions. Or, c’est là où nous devons aller si nous voulons apporter des changements durables aux conditions de travail des apprentis et des collaborateurs de l’hôtellerie-restauration, et ce dans le but de rendre la branche plus attractive.
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée est un sujet récurrent. Quelle est votre position à ce sujet?
Selon moi, la question n’en est pas une. Il n’y a pas de pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans l’hôtellerie-restauration. Mais il y a dans le secteur un problème structurel, ainsi qu’une forte intensification de la lutte pour les talents.
C’est-à-dire?
Il y a trop d’entreprises mal gérées par des responsables non qualifiés qui absorbent inutilement du personnel qualifié. Ces structures sont aussi en partie responsables du fait que de bonnes personnes quittent la branche. En clair, il y a pénurie de main-d’œuvre qualifiée là où les entreprises et les employeurs ne font pas correctement leur travail. Si l’on satisfait aux exigences que nous avons formulées de manière claire dans notre manifeste*, il est toujours possible de trouver de bons collaborateurs et même de recevoir des candidatures spontanées. L’Art Deco Hotel Montana à Lucerne en est un bon exemple. Il n’a guère de difficultés à pourvoir les postes vacants.
Et pourtant, Hotel & Gastro Union a lancé la campagne de signatures «Ensemble contre la pénurie de personnel».
A travers cette initiative, nous contribuons à l’évolution des mentalités et à l’instauration d’un nouveau paradigme chez les employeurs, tout en revitalisant le partenariat social. Notre objectif est de redorer avec les employeurs le blason de l’hôtellerie-restauration, afin d’en faire de nouveau un secteur dans lequel les collaboratrices et collaborateurs s’investissent avec passion et fierté, et non pas seulement parce qu’ils ne trouvent pas d’autre emploi.
L’une des exigences porte sur l’augmentation des salaires à tous les niveaux de formation.
Exactement, car le salaire est un facteur important dans la lutte pour les talents. Si l’on veut séduire les meilleures personnes, il faut aussi leur offrir plus que les 3 % d’augmentation liés au renchérissement. Ici aussi, l’Art Deco Hotel Montana joue un rôle de pionnier. Dès fin 2026, tous les collaborateurs y recevront un salaire minimum de 5000 francs. Cette revalorisation volontaire a pour but de se démarquer des autres établissements. Dans cette optique, les processus internes sont en cours d’optimisation.
L’argent seul ne fait pas le bonheur, dit-on généralement.
C’est vrai. Il est donc d’autant plus important que les entreprises changent de mentalité dans leur recherche de collaborateurs et qu’elles se positionnent comme des employeurs attractifs sur le marché de l’emploi. Au lieu de dire ce qu’elles recherchent, elles devraient dire ce qu’elles offrent à leurs collaborateurs – en plus de la CCNT. Par exemple, des horaires de travail flexibles, un jour de vacances payé lorsque le collaborateur fête son anniversaire, des plans de carrière concrets ainsi que des formations continues.
Quelles sont vos résolutions pour la nouvelle année?
Dans deux ans, je prendrai ma retraite. D’ici là, il me tient à cœur de faire avancer le plus de dossiers possible, et ce de manière positive. En outre, j’aimerais organiser ma succession de manière à ce que la continuité soit assurée au sein de Hotel & Gastro Union.
(rif/pcl)
* Dans son manifeste, Hotel & Gastro Union a formulé un certain nombre d’exigences articulées autour de la formation, de la gestion du personnel, de l’organisation du temps de travail et de la rémunération. Les personnes souhaitant soutenir cette démarche peuvent signer la pétition «Ensemble contre la pénurie de personnel» en ligne (hotelgastrounion.ch).
Urs Masshardt est secrétaire général de Hotel & Gastro Union depuis 16 ans. Il est aussi président du conseil de fondation de l’Ecole hôtelière suisse de Lucerne et président du conseil d’administration de l’Art Deco Hotel Montana à Lucerne.