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Tequila et mezcal: le marché s’enflamme

Pure ou en cocktail, fraîche ou vieillie en fûts, l’eau-de-vie d’agave affole les aficionados depuis quelques années.

  • L’appellation tequila est réservée à la production de cinq Etats: Jalisco, Guanajuato, Michoacan, Nayarit et Tamaulipas. (DR)
  • Le mezcal peut être issu d’une douzaine de variétés d’agaves. (DR)

Un milliard et quelques poussières de dollars. C’est la somme déboursée par le groupe Diageo, à en croire plusieurs médias spécialisés, pour racheter Casamigos, la marque de tequila créée par George Clooney et deux de ses amis cinq ans plus tôt. Un montant pharaonique qui illustre l’envolée de ce marché depuis quelques années. Aux Etats-Unis, d’où nous arrive ce trend et qui concentre 55% de la consommation mondiale d’eau-de-vie d’agave, celle-ci devrait dépasser pour la première fois le bourbon en 2022, selon l’International Wine and Spirit Research (IWSR).

Le coup de pouce du cinéma

Et devinez quel est le cocktail le plus populaire outre-Atlantique? Citron vert, triple sec, sel et tequila? Si si, c’est bien la recette de la margarita, laquelle n’en finit pas de se réinventer par ailleurs, notamment avec de la grenade, l’ananas ou des pêches givrées. Mais que s’est-il passé pour que les shots assassins de tequila paf proposés au temps de nos soirées d’étudiants, avec gueule de bois carabinée à l’atterrissage, se métamorphosent en moins d’une décennie en boisson la plus hype du moment?

La destination Mexique est à la mode et avec elle l’aura magique et les rituels qui l’entourent: fête nationale du 5 mai, jour des Morts et son folklore fascinant. De même, le cinéma dans son ensemble a beaucoup contribué à cette vogue, souligne Santiago Xavier Cortina Gallardo, dont la famille possède une des plus anciennes distilleries de la région de Jalisco et est à l’origine de Volcan de Mi Tierra, première tequila créée en partenariat avec le groupe Moët Hennessy. Propriétaire de la marque, Santiago Gallardo cite notamment Vanilla Sky (Cameron Crowe, 2001), la série Apple TV+  WeCrashed (2022) ou encore Top Gun: Maverick (Joseph Kosinski, 2022). Cette excellente stratégie de product placement n’est évidemment pas à l’origine du phénomène lui-même mais contribue à l’amplifier.

Selon l’expert mexicain, l’explication est plutôt à chercher du côté d’un net rebond qualitatif de ces eaux-de-vie traditionnelles, ainsi que dans le dynamisme des opérateurs. On compte aujourd’hui 2200 marques de tequila actives au Mexique, 200 distilleries dont 16 single brands, qui ont toutes bénéficié de la pandémie durant laquelle la consommation de tequila a augmenté dans les ménages.

Un trend qui gagne la Suisse

En Suisse, Romain Tritsch, bartender et président pour la Suisse romande de la Swiss Barkeeper Union confirme. «Le thème du Mexique est très populaire: nous l’avons notamment choisi pour notre dernier concours de mixologie, en juin dernier. Quand je suis devenu barman, en 2006, on trouvait deux ou trois marques de tequila sur le marché et on avait à peine entendu parler de mezcal. Aujourd’hui l’offre est d’une diversité incroyable. On découvre un univers fascinant avec sa culture millénaire, des terroirs et des crus très typés.»

De nombreux bars se sont spécialisés, à commencer par la Taqueria Los Cuñados, à Genève, qui propose un nombre record en Suisse et peut-être en Europe, avec plus de 370 références. D’autres adresses appréciées de la jeune génération telles les enseignes Lucha Libre, les restaurants mexicains ou latinos suivent le mouvement. On est passé des tequila paf à une explosion de grands crus. Romain Tritsch cite notamment les mezcal Amaras ou la marque Ilegal, très typés et divers, à base de variétés rares et uniques d’agaves. Quant aux tequilas, certaines marques premium telles Casa Azul peuvent atteindre les 3500 euros et sont constamment en rupture de stock: un shot de son Extra Nero coûte environ 50 francs.

La qualité, la rareté, les méthodes artisanales et le temps nécessaire justifient, selon le bartender, les prix de certains grands mezcals et tequilas. Qui sont les amateurs prêts à s’offrir un shot d’évasion latino à des prix pareils? «Des businessmen, des épicuriens, des curieux qui apprécient la convivialité de ces rituels, à toute heure, de l’apéro au digestif.» La mixologie a contribué à revisiter ces boissons ancestrales; les palaces les associent volontiers à des cigares et on apprécie aussi de nombreux pairings avec des ceviche ou des sushis, le mole traditionnel et les omniprésents tacos, voire des desserts chocolatés ou fruités.

 (Véronique Zbinden)


La tequila, quézaco?

A l’origine, une plante
semblable à une étoile géante, bleutée et tout à fait piquante: l’agave. Les feuilles sont
élaguées pour ne garder que
le coeur, évoquant un ananas géant et nommé de même piña. La piña est cuite afin de concentrer ses sucres naturels dans des fours à vapeur en brique, voire pour le mezcal dans des fours rudimentaires de pierre creusés dans le sol. A l’inverse, l’industrie recourt à des procédés chimiques pour la cuisson. La pulpe est broyée et filtrée, puis le jus distillé. Les meilleures tequilas sont issues à 100% de l’agave Blue Weber; les mixtos, de moindre intérêt, peuvent y adjoindre d’autres variétés,
à raison de 49% au maximum.


Davantage d’informations:

tequilafest.co.uk