Le chef et entrepreneur ouvre simultanément Brasserie Süd et The Counter dans le décor historique de la gare centrale de Zurich, avec son complice Valentin Diem.
Inaugurés ces derniers jours, la Brasserie Süd et son prolongement gastronomique The Counter, à l’étage, sont l’événement gourmand outre-Sarine et au-delà ; aucune référence aux brasseries lyonnaises imaginées par Paul Bocuse et baptisées selon les quatre points cardinaux. Simplement, nous nous trouvons dans l’aile sud de la gare centrale, face à la Bahnhofstrasse. «C’est assurément notre projet le plus ambitieux, qui marque un cap», souligne Nenad Mlinarevic, associé ici comme pour ses trois précédentes adresses (Bauernschaenke, Neue Taverne, Neumarkt) à son complice Valentin Diem. Un projet ambitieux, pas seulement en termes d’investissement, d’emplacement et de fréquentation potentielle, mais aussi parce que le duo a conclu un bail de vingt ans avec la régie fédérale et que l’attente est considérable.
D’un côté, la brasserie avec ses portiques voûtés, son plafond à caissons vertigineux et ses banquettes moelleuses couleur lichen, offre quelque 130 places assises et restera ouverte sept jours sur sept, du petit déjeuner au dernier cocktail vespéral. Au sol, une manière de fresque inversée convoquant la galaxie et ses poussières d’astéroïdes concourt à l’isolation du lieu, à sa sobriété chic; ouverte sur la salle, une cuisine de finition donne à voir les derniers préparatifs de la jeune équipe – en continuité avec la cuisine principale du haut; le bar Da Capo accueillera les derniers arrivés avec notamment une jolie offre de cocktails et mocktails. A l’extérieur, les premières enseignes de la Bahnhofstrasse scintillent déjà de toutes leurs décos de Noël. Enfin, à l’étage, The Counter a été conçu selon un plan central, un peu à la manière des comptoirs japonais pour recevoir les foodies les plus avertis (23 places assises seulement) et leur permettre de dialoguer avec Mitja Birlo et son équipe autour d’une petite carte de haut vol. Ce dernier a fait des étincelles dans les Grisons notamment (doublement étoilé au 7132 Silver, Hôtel des Thermes de Vals) avant de rejoindre l’équipe de Nenad et Valentin, qui lui ont donné carte blanche pour son concept de fine dining.
Une grande gare est une ruche, ou peut-être une fourmilière, avec ses couloirs en labyrinthes et ses niveaux superposés, sa frénésie, son cœur palpitant. Celle-ci date de 1848, avant d’être agrandie et rénovée à plusieurs reprises. C’est un lieu de passage et de shopping, où l’offre culinaire est déjà abondante, du take away au service à table, de la pasta aux enseignes exotiques.
Nenad et Valentin comptent bien y imposer leur patte et faire venir les citadins résidents et les autres. Avec son décor imposant et son accueil efficace et stylé, leur Süd rappelle le Train Bleu, cette autre brasserie historique de la Gare de Lyon. Autres bonnes nouvelles, on ne sera pas obligé d’y laisser sa chemise et on pourra se contenter de s’attabler autour d’une belle salade ou de partager quelques grignotages, si l’on n’opte pas pour les impeccables classiques de brasserie – suisses et français – revisités: moules ou tournedos Rossini, poularde farcie ou piccata d’aubergines, soupes et autres frites.
Zurich serait-elle la nouvelle Copenhague? A tenter de suivre les ouvertures de lieux originaux et la multiplication des nouveaux concepts depuis quelques années, on n’est pas loin de le croire. Ce quadra brun vaguement ébouriffé et résolument tatoué n’y est pas étranger.
(Véronique Zbinden)