Mediadaten Données Media Olympiade der Köche

Triomphe du moringa et éclipse de l’œuf parfait

Que nous réserve 2024 en termes de nouveaux ingrédients, boissons et modes de cuisson? Revue des tendances avec des experts et oracles de la gastronomie.

Les champignons sont le nouveau graal. Quel meilleur substitut à la viande, aux saveurs aussi intenses, aux textures et couleurs aussi fascinantes et diverses, que l’umami et la complexité aromatique présents dans le règne fongique? Confirmation avec les pionniers zurichois de Pilzchef, dont l’hydne hérisson et la pleurote huître rose ont séduit de nombreux restaurants, se prêtent à 36 sortes de boulettes et interprétations originales du lard, du rosbif ou des saucisses, ringardisant même le champignon de Paris.

La betterave superstar

Autre produit porté par un élan neuf, le sarrasin, intéressant pour les sols en tant que culture couvrante et riche en azote, mais aussi pour son apport en protéines et fibres; la kasha locale proposée par Dicifood en est un délicieux exemple. Tout comme les sobachas, infusions qu’on retrouve à de nombreuses cartes et pairings sans alcool, qu’elles soient issues de sarrasin ou d’autres céréales. De plus en plus apprécié, le cacao est désormais entièrement valorisé: du grué à la membrane de la fève et au mucilage, dont on tire toutes sortes de boissons, macérations, infusions et confitures, voire édulcorants naturels.

Le sarrasin bénéficie d’un intérêt marqué en raison de son riche apport en protéines et fibres. (Adobe-Stock)

Parmi les ingrédients phares de 2024, l’auteur et expert Christian Grünwald cite la betterave, protéiforme, qui se prête à une autre success-story locale: la gamme de Veg-Alp imaginée par Esther Kern et Jann Hoffmann, qui la déclinent sous forme de steak, charcuteries ou pseudo viande séchée. A la hausse également, les produits – ou nouveaux composants des alternatives plant-based – tels le taro, l’okra, l’aubergine, le maïs et le quinoa, les haricots verts et les fruits secs, voire les algues, le soja et l’edamame, ces derniers souvent mis à contribution pour imiter le poisson et les fruits de mer.

L’influence croissante des femmes

Maria Canabal, experte et journaliste spécialisée, cite les nombreuses variétés de nouveaux piments, portés par l’engouement pour la cuisine mexicaine (guajillo, corne de chèvre, piment scorpion). Auxquels Christian Grünwald ajoute le miso, très apprécié, et le koji, dont il se confectionne d’excellentes versions locales et artisanales, fraîches et non plus pasteurisées (Swissmiso, sur la Côte).

On s’en voudrait d’omettre ici l’avènement du moringa, que Maria Canabal décrit comme bientôt triomphal. Moringa oleifera? Originaire d’Inde, il est présent avec différentes variétés sur le continent africain et du Cambodge à la Thaïlande. La tradition ayurvédique utilise les feuilles pour traiter des maux innombrables et le pois quénique (son autre nom) est anti-oxydant, anti-inflammatoire et doté de précieuses vertus nutritionnelles, bref LE super aliment du moment, dont on consomme les feuilles et les jeunes gousses, évoquant des épinards ou des haricots, les graines, dont on extrait une huile douce et jusqu’aux racines, qu’on apprête en curries, sauces, ou soupes ou dont on grille les graines comme des cacahuètes. Parmi les tendances de fond, Hanni Rützler estime que les femmes devraient infléchir plus que jamais le cours des choses. La montée en puissance d’un nombre croissant de female connoisseurs dans les métiers de bouche va induire une meilleure prise en compte des enjeux sociaux et écologiques, ouvrant la voie à des lendemains plus durables et inclusifs, note en substance l’experte autrichienne. C’est elle encore qui avait défini ces dernières années le concept de local exotics, qui a plus que jamais le vent en poupe. Le consommateur fait confiance à la production locale, tout en aspirant à des saveurs autres et des ingrédients plus lointains, voire exotiques. D’où le succès du saumon des Alpes (Swiss Lachs), des crevettes helvétiques (Aemme Shrimp) et des cultures indigènes d’origine lointaine, du poivre au gingembre.

Le succès du saumon des Alpes ne se dément pas. (Keystone-ats)

(Véronique Zbinden)


La fin de l’œuf parfait?

Un vœu porté par nombre d’observateurs et food writers pourrait bien se réaliser en 2024.  L’éclipse, voire la dispa­rition totale, de l’œuf parfait, ce gimmick usé et galvaudé depuis plus de dix ans, cette avanie au génie autoproclamé. Les paris sont ouverts.


Davantage d’informations:

mariacanabal.com