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«Une offre qui ne se refuse pas»

Un an après avoir renoncé à ses deux étoiles, le chef sierrois donne un nouveau tour à sa carrière en rejoignant le groupe des Remontées mécaniques de Grimentz-Zinal en tant que responsable Horeca.

C’est en avril 2023 que Didier de Courten fermera le Terminus, à Sierre (VS). (DR)

Comment avez-vous été amené à prendre cette décision, un an après avoir fermé votre table gastronomique pour vous recentrer sur la brasserie et l’hôtel?
J’intervenais occasionnellement comme consultant dans la restauration depuis 2019 et je songeais à créer une société de consulting. Avec la pandémie, cette activité a pris de l’ampleur et j’ai créé DDC en 2020. Je me suis rendu compte que je ne pouvais pas tout mener de front et, en mai 2021, j’ai renoncé aux étoiles et à figurer dans les guides. En septembre, j’ai eu un premier mandat pour la société des remontées mécaniques de Grimentz-Zinal, (RMGZ), que j’ai eu beaucoup de plaisir à mener.

De quoi s’agissait-il?
Un projet magnifique qui est en cours de réalisation avec un restaurant à 2700  m d’altitude, un double accès en cabines par Grimentz et par Zinal, un panorama incroyable avec un ensoleillement maximal. Voué à ouvrir en octobre 2023, l’Espace Weisshorn sera un projet écoresponsable alimenté par l’énergie solaire et des sources locales; le restaurant comptera quelque 175 places assises, plus une buvette à l’étage inférieur, une cuisine ouverte valorisant des ingrédients de proximité. Le décor a été confié à l’architecte d’intérieur Alexa Holzer. J’ai voyagé pour concevoir ma part du projet, des Dolomites à l’Autriche, et on n’y trouve rien de comparable.

Et ensuite?
Là-dessus, les RMGZ m’ont confié un autre mandat, de coaching auprès de leurs différents restaurants, et je me suis rendu compte que j’adorais ça. Il y a à la fois la dimension créative en cuisine, la conception de nouveaux lieux, avec une identité, une couleur, à mettre en avant.

On l’ignore parfois en dehors du Valais, mais l’activité des RMGZ ne se limite de loin pas aux télécabines…
Le groupe est d’abord axé sur les remontées, qui restent le cœur de son activité, mais, pour parer aux changements climatiques et aux saisons de ski de plus en plus incertaines, il a misé sur la restauration, sans avoir toutefois l’obsession du chiffre d’affaires. Ils ont fait appel à moi parce qu’ils manquaient de compétences dans ce domaine et je leur ai suggéré de confier ce rôle à un professionnel, à l’interne. Les plats signatures que j’ai créés entre-temps ont eu beaucoup de succès et, en avril, le groupe a fait un appel d’offres pour la fonction de responsable Horeca, l’équivalent d’un chef exécutif, tout en me disant: fais-nous une proposition. A 54 ans, avec mon parcours et les envies que j’ai encore, c’est une offre qui ne se refusait pas.

Cela recouvre une grande diversité de formules, de la buvette au boutique hôtel?
La société est très dynamique, ambitieuse et bien structurée. A chaque établissement acheté, elle met en place un gérant; grâce à son administration centralisée, les gérants sont déchargés de nombreuses tâches. Je pense que c’est un modèle d’avenir, que beaucoup de chefs rêvent d’avoir, avec un salaire fixe et un groupe qui les épaule. C’était important pour eux de se diversifier et de garder des lits chauds l’hiver en haute montagne. Ils ont acquis 12 restaurants entre les deux stations, dont cinq hôtels et l’Espace Weisshorn.

Vous quitterez le Terminus en avril 2023; quid de votre team?
J’ai 33 collaborateurs et j’ai dit clairement que personne ne resterait au bord du chemin: tous ceux qui sont motivés auront des possibilités au sein du groupe. Ce dernier compte plus de 200 collaborateurs et un énorme potentiel, l’avantage de pouvoir loger le personnel et lui offrir de belles perspectives d’évolution, plusieurs hôtels de charme et Grimentz, un des plus beaux villages de Suisse. La demande est très forte et l’offre n’y suffit jamais. J’ai déjà des demandes de mes collaborateurs.

Que va devenir le Terminus?
La fin de notre bail était en 2025 et j’ai annoncé mon départ aux Rouvinez voici trois semaines; ils ont d’abord été très surpris, mais nous sommes tous motivés à trouver quelqu’un de bien pour nous succéder, tout en sachant que le modèle doit évoluer: il est clair que la nouvelle génération n’acceptera plus – surtout après la pandémie – de travailler 18 heures par jour pour 3500 francs, comme nous l’avons fait. Le modèle de la haute gastronomie tel qu’on l’a connu est révolu; il reste à le réinventer. Rien qu’en Valais, plusieurs tables de qualité ferment sans avoir de repreneur: Café Berra ou Les Touristes notamment, d’autres suivront. Ce n’est plus viable pour un chef indépendant aujourd’hui s’il ne peut compter sur des investisseurs, des mécènes, un groupe pour l’épauler, en particulier hors des métropoles…

(Propos recueillis par Véronique Zbinden)


Davantage d’informations:

hotel-terminus.ch/fr