Telle est l’annonce faite par l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), qui a déménagé de Paris à Dijon. Et en Suisse? C’est la baisse de la consommation qui inquiète.
Seule la France tire son épingle du jeu. Avec 46 millions d’hectolitres, elle redevient le premier producteur mondial de vins, en hausse de 3 % sur la moyenne des cinq dernières années. Elle détrône l’Espagne (moins 13 % sur cinq ans) et devance l’Italie (moins 19 %). La baisse dans ces pays méditerranéens est due à la fois à des pluies torrentielles au printemps, qui ont favorisé le mildiou, puis à la sécheresse estivale. La vigne, plante résiliente, a de la peine à s’adapter au changement climatique déclenchant des accidents extrêmes. Et c’est encore pire dans l’hémisphère sud, où les volumes de production sont en retrait par rapport à 2022. «L’Australie, l’Argentine, le Chili, l’Afrique du Sud et le Brésil ont tous été fortement touchés par des conditions météorologiques défavorables. La seule exception est la Nouvelle-Zélande, unique pays où le niveau de production est supérieur à la moyenne quinquennale», écrit l’OIV.
Ces conditions planétaires font qu’on devrait enregistrer la plus petite récolte depuis 1961: autour de 244 millions d’hectolitres, soit 7 % de baisse par rapport à 2022. En 1961, très grand millésime à Bordeaux (avec 1945), la vendange était encore plus basse: 214 millions d’hectolitres. Quant au petit millésime 2017, il affichait 248 millions d’hectolitres. Reste une inconnue: la Chine, où la production fluctue grandement depuis cinq ans, et où le marché du vin n’a pas retrouvé ses marques d’avant le covid. Quant à l’Union européenne à 27 pays, elle représente 150 millions d’hectolitres.
Et la Suisse? Selon l’OIV, elle annonce un million d’hectolitres, soit 100 millions de litres, 4 % de plus qu’en 2022, et 14 % de plus que la moyenne de ces cinq dernières années. Pour la seconde année consécutive, quantité et qualité sont au rendez-vous.
A la Fédération vigneronne vaudoise, le nouveau secrétaire, Alain Chapuis, venu de Manor, et qui a succédé à Philippe Herminjard parti à la retraite cet été, a cité des chiffres éloquents sur la consommation des vins en Suisse, entre 2004 et 2022. La population a cru de 18 % pendant ce laps de temps, mais la consommation de vins a chuté de près de 15 %. Cela représente 14 bouteilles de moins par habitant, soit une moyenne de 27 litres de vin par habitant et par année (contre 38 litres en 2004). Intéressante aussi, la comparaison entre consommation de vins indigènes et de vins étrangers, depuis la libéralisation des barrières douanières. Les vins blancs étrangers, premières victimes du protectionnisme, ont pu (re)bondir de 43,4 %, tandis que les vins blancs indigènes «trinquaient» de 24,4 %... La baisse générale de la consommation a pénalisé les vins rouges étrangers et suisses quasi d’égale manière: moins 21 % pour les premiers, moins 19 % pour les seconds, mais le volume des premiers représente deux fois et demi celui des seconds.
Les vignerons suisses – qui cherchent parmi les parlementaires alémaniques les successeurs aux latins Marco Romano (Interprofession de la vigne et du vin), et Jacques Bourgeois (Fédération suisse des vignerons) – visent une part de marché de 40 % pour les vins suisses. Ils doivent faire face à une proposition de diminution de l’aide à la promotion, dictée par le Conseil fédéral, qui, après avoir atteint 9 millions de francs en 2023, retomberait à 2 millions de francs. Les Chambres devront en découdre à la session de décembre.
(Pierre Thomas)