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Nicolas Trentesaux «Le lien entre l’alimentation et la santé se renforce»

Le Salon International de l’Alimentation ­parisien (SIAL), vitrine mondiale de l’innovation, vient de fermer ses portes à Paris. Petit tour d’horizon et décodage avec son directeur.

  • Nicolas Trentesaux est à la tête du réseau SIAL, qui, outre le Salon parisien, organise sept autres manifestations sur plusieurs continents.

HGH: Nicolas Trentesaux, vous êtes directeur du réseau SIAL. Un premier commentaire, à l’heure de la fermeture de l’édition 2016, du Salon international de l’alimentation?
Nicolas Trentesaux: Avec une croissance de 10% de l’offre par rapport à 2014, c’est une édition très réussie. La surface, dévolue pour moitié aux pavillons nationaux, articulée en secteurs pour l’autre moitié, a connu partout la même augmentation. Le Salon a présenté quelque 450’000 produits, ce qui nous a contraints à repousser les murs. Vu le contexte international, les attentats récents, nous avions quelques inquiétudes, mais il y a eu cette année encore 70% de visiteurs étrangers. On constate aussi que cette édition a vu plus d’innovations que jamais, venues du monde entier, avec près de 2200 produits retenus, soit en gros 10% de l’offre mondiale en termes de nouveautés.

Une grande étude a également été menée sur la vision et les attentes des consommateurs de quelque 150 pays. Quels en sont les points forts? L’attente numéro un?
Plaisir, qualité et convivialité, suivie par une triple exigence en matière de transparence, santé et respect de l’environnement. Cette exigence croissante, portée par les réseaux sociaux, veut que le consommateur soit un acteur et non le jouet de l’industrie.

Avez-vous le sentiment que les industriels répondent vraiment à cette demande de transparence?
L’industrie joue de plus en plus le jeu et n’aura pas d’autre issue que de se plier à cette demande. Notre étude souligne aussi que le lien entre santé et alimentation, évident en Asie, pour des raisons culturelles, ne l’était pas jusqu’ici dans nos pays, mais se renforce. On assiste à une véritable prise de conscience. Le lien santé-alimentation se renforce du fait de cette aspiration à la «naturalité»: une attente de produits plus simples, originels, moins transformés. On est très loin des alicaments plébiscités voici quelques années. La confiance à l’égard de la qualité des produits alimentaires a ainsi légèrement baissé: 66% des consommateurs, tous pays confondus, estiment probable que certains aliments nuisent à leur santé (53% en 2012).

«L’envie de consommer local est à la croisée d’une double aspiration»


Et la demande de produits locaux, de proximité?

L’envie de consommer local est à la croisée d’une double aspiration, à la naturalité et au respect de l’environnement, même si elle ne se traduit pas toujours dans l’acte d’achat. Cette attente est parfois sublimée, mais gagne en importance: il y a une réflexion sur la durabilité, une exigence à l’égard des producteurs, bref, on y vient de plus en plus.

A propos de plaisir, quel rôle joue ici le contexte économique?

Si beaucoup de produits répondent à cette attente – la truffe et le safran notamment sont omniprésents –, la contrainte sur le prix est réelle. Du coup, on va se faire plaisir par petites touches plutôt qu’à hautes doses, et en recherchant des ingrédients de grande qualité. On peut prendre ici l’exemple, parmi les produits primés, du moulin à champignons, qui permet d’ajouter quelques notes de cèpes à des pâtes ou une omelette.

Autre tendance, après la «naturalité», le «tout végétal» gagne en importance?

C’est la grande montée en puissance du végétal associé à la notion de plaisir: ni militant ni antispéciste, mais gourmand. La médaille d’or des produits innovants a été décernée à une gamme de boulettes et steaks à base de légumineuses, des mets vraiment très bons. L’explosion du bio se poursuit également: 53% des consommateurs essaient d’en consommer dès que possible; de même, on est plus attentifs aux mentions «sans antobiotiques», «sans huile de palme», etc.

C’était un peu le salon du «sans»: sans viande, sans intrants ni additifs, gluten, etc.

En effet, c’est une grosse contribution à l’innovation. L’énorme succès du quinoa (entre autres produits sans gluten) ne se dément pas. Parmi les autres ingrédients qui poursuivent leur croissance: les graines de chia, le chou kale, les légumineuses et les algues qui ont franchi ici une étape capitale, en se présentant sous des formes nouvelles pour nous européens: salades, pâtes à tartiner, signe que le grand public commence à les apprivoiser. La vanille, ingrédient phare en 2014, entame un vrai recul.

Et l’agriculture urbaine, un autre trend?

 Elle s’inscrit dans cet élan vers la naturalité. Produire soi-même relève en partie du fantasme, bien que la France reste plus rurale qu’on ne pense. C’est une aspiration qui se développe en même temps que le tissu urbain, traduit une vraie quête.

Né en en 1964, le SIAL a franchi le cap du demi-siècle: comment a-t-il évolué et comment voyez-vous l’avenir?
On est passé d’un alignement de stands basiques à davantage de contenus et de réflexion pour décrypter les tendances et le futur: beaucoup d’animations, de colloques (l’alimentation durable, etc.) et un très fort accent sur l’innovation. Le SIAL est désormais un réseau mondial avec huit Salons, de Toronto à Manille et de Shanghai à Abu Dhabi. Notre nouvelle identité visuelle, autour de différents fruits se veut une invitation à creuser et innover.

La croissance et le gigantisme même du SIAL peuvent toutefois paraître en décalage avec son contenu, cette attente du consommateur qui souhaite revenir à plus de simplicité?
La croissance démographique et l’explosion mondiale de l’agroalimentaire sont une réalité – le Salon chinois compte déjà 3000 exposants –, et, si Paris a des limites à sa croissance, il reste ailleurs une forte marge de progression.

Propos recueillis par
Véronique Zbinden

Le SIAL en bref

Avec plus de 155 000 visiteurs et quelque 7000 exposants, dont 85% à l’international, une surface de 210 000 m2 – soit 100 hypermarchés mis bout à bout –, on dit du SIAL qu’il est «le plus grand hypermarché du monde». Un Salon biennal marqué par l’innovation, puisqu’un de ses temps fort est le grand prix des produits les plus novateurs, mais aussi par l’étude 360°, qui analyse les attentes et habitudes de consommation de quelque 150 pays.

Davantage d’informations:
<link http: www.sialparis.fr>www.sialparis.fr