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Un demi-siècle de voluptés à la table du Chat-Botté

A Genève, l’enseigne phare de Beau-Rivage et son chef étoilé Dominique Gauthier célèbrent l’anniversaire du restaurant en novembre avec un menu somptueux.

La table de Dominique Gauthier a 18/20 au Gault & Millau et 1 étoile Michelin. (DR)

On sait qu’il a vu naître la Déclaration universelle des droits de l’homme et mourir l’impératrice Elisabeth d’Autriche. Beau-Rivage fait partie de l’identité genevoise et du paysage aussi sûrement que le Jet d’eau ou le Mur des Réformateurs, à tel point qu’il est difficile de lui donner un âge. Si l’hôtel a fêté ses 150 ans en 2015, son restaurant gastronomique, le Chat-Botté, célèbre pour sa part son demi-siècle en ce moment.

On doit à Fred Mayer, père de Jacques Mayer, copropriétaire et président de Beau-Rivage, d’avoir rêvé pour son hôtel d’une table ambitieuse. Un vaste chantier s’ouvre en 1967 pour créer le Chat-Botté: on le dote d’une broche murale et de sa fameuse terrasse ouverte sur le lac et le Jet d’eau. L’enseigne est pionnière, à une époque où les restaurants d’hôtel sont rarement ouverts au public et de haut niveau: de grands chefs s’y succèdent.

Une cuisine légère et personnelle

Difficile d’imaginer un autre décor que ces tons crème et chocolat, cette sobriété soyeuse, nappée de blanc, tapissée d’épaisses moquettes, cheminées et recoins feutrés, vue en forme de carte postale. Il a pourtant été revu et réactualisé en 2015. En remontant le temps et les photos d’origine, on découvre un décor boisé, des meubles massifs et foncés, la fameuse broche et le découpage à table des pièces entières, avec un piano et décorum. Difficile de croire, en regardant l’album souvenir des lieux que l’on venait manger le poulet à la broche et le lapin moutarde, bien calé dans des sièges capitonnés.

Aujourd’hui, quoi qu’il en soit, on y mange délicieusement grâce à Dominique Gauthier et sa brigade étoilée: une cuisine ensoleillée, légère, très personnelle, à la hauteur du décor, invitant de même à prendre le large. Un voyage via l’assiette, une envolée vers des saveurs puissantes et concentrées.

Cinquante ans. Le chef d’origine dauphinoise a partagé la moitié de ce temps, entrant en 1992 dans la maison légendaire après un parcours auprès de plusieurs grands noms du patrimoine hexagonal: Fernand Point, Jo Rostang, Georges Blanc et Jacques Chibois. Le jeune homme fait très premier de classe et ne tarde pas à gravir les échelons pour devenir chef à la suite de Richard Cressac. Changement de style et de manières.

Dominique Gauthier a créé pour l’occasion un menu anniversaire fastueux, qui sera proposé durant tout le mois de novembre, midi et soir. Mais encore? Des St-Jacques malicieusement fouettées par une touche de caviar et l’acidulé de la pomme verte; un bar de ligne à la cuisson minimaliste, chair ferme et nacrée soulignée par un puissant bouillon, sa chiffonnade de cèpes aux parfums de kaffir; un dos de chevreuil autrichien rosé escorté d’un coulis concentré de sureau et baies rouges et d’un fin gâteau associant poire et panais. Une envolée de saveurs étincelantes, conclue par un dessert subtil associant audacieusement le pamplemousse rose et la pistache de Bronte.

De nombreuses distinctions

Depuis son arrivée au Chat-Botté en 1992, Dominique Gauthier a décroché de nombreuses distinctions, dont un macaron Michelin en 2010, les titres de Cuisinier de l’année 2009 et la note de 18/20 au Gault & Millau. Il règne aujourd’hui sur une cuisine modèle aux proportions impressionnantes, ouverte et prolongée par la pâtisserie et la table d’hôtes, qui doit faire l’envie de tous ses collègues. Une atmosphère étonnamment détendue pour un resto étoilé et une brigade redoutable d’efficacité qui s’oriente, dans le sillage du chef, vers davantage de produits de proximité – agneau de Vessy, cabris et lapins de Cartigny, volaille de Satigny, cochon fermier de Jussy, ainsi que trois maraî- chers genevois.

La carte des vins de Beau-Rivage est elle aussi remarquable, servie par un autre passionné au beau parcours. D’origine basque, Vincent Debergé a notamment secondé Enrico Bernardo au Ritz, meilleur Sommelier du monde 2004, avant de rejoindre le palace genevois en 2011. Chef sommelier, Vincent Debergé est aussi directeur du Chat-Botté.

Ce bijou demeure aujourd’hui le dernier palace genevois encore en mains familiales. La cinquième génération vient d’accéder à la tête de l’entreprise: Alexandre Nickbarte-Mayer a été nommé CEO de Beau-Rivage en 2016, alors que les autres membres de la famille demeurent impliqués dans la gestion et le rayonnement de la «Maison». Il entend perpétuer la philosophie de ses devanciers, depuis le pionnier Jean-Jacques Mayer, quittant son village proche de Stuttgart au début du XVIIe siècle pour se vouer aux métiers de l’accueil. Et faire de Beau-Rivage un lieu dévolu au luxe et au rêve, bien avant César Ritz, qui préfigure l’âge d’or du tourisme et reçoit déjà toute l’aristocratie de la Belle Epoque.

(Véronique Zbinden)


Menu anniversaire à 170 francs. Réservation indispensable par e-mail (restauration@beau-rivage.ch) ou téléphone (+41 22 716 69 78).


Davantage d’informations:

www.beau-rivage.ch