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Du malbec suisse? Plutôt deux fois qu’une

Quel est le dernier clone viticole certifié par Agroscope? Un «malbec précoce» sélectionné par le chef du groupe viticulture, Jean-Laurent Spring, dans le vignoble de Nax (VS).

Le malbec a tendance à bien supporter le changement climatique. (Unsplash)

Le cépage de Cahors, dans le Sud-Ouest de la France, et de Mendoza, en Argentine, se développe un peu partout en Suisse. Selon les chiffres 2020, publiés par l’Office fédéral de l’agriculture, il pointe au 19e rang des rouges, avec 23 ha plantés dans 17 cantons. C’est certes peu, comparé au trio de tête, emmené par le pinot noir (3875 ha, mais 73 ha de perdus) devant le merlot (1220 ha, un gain de 39 ha) qui, pour la première fois, dépasse le gamay (1145 ha, en diminution de 58 ha). Le merlot est très présent au Tessin (889 ha), depuis le début du 20e siècle déjà, mais se développe, depuis l’entame du 21e siècle, dans le reste de la Suisse. Le malbec suit cette tendance.

L’Argovien Andreas Meier, pépiniériste et encaveur à Würenlingen, rappelle que les deux cépages, l’un, le merlot, originaire du Bordelais, l’autre le malbec, du Sud-Ouest de la France, sont proches. «Il est surprenant de voir comme le malbec mûrit en Suisse. Il donne des vins plus délicats, plus juteux, moins puissants que le merlot».

Des exemples dans toute la Suisse

Le pépiniériste a fait venir ses ceps il y a trente ans de Cahors, où il est appelé côt, et propose ces sélections à ses clients. Il en a planté sur son domaine, sur une parcelle à Döttingen. Au début, il l’assemblait à du pinot noir, puis il l’a vinifié seul, dès 2013, et l’élève en barriques un an. Le résultat? Un vin à la texture agréable, parfait à table sur des viandes, aux tanins arrondis par le bois. La cave saint-galloise Schmid-Wetli, à Berneck, en propose une version à base de grappes séchées, selon la recette de l’amarone, uniquement dans les meilleurs millésimes, tirés d’une vigne d’Appenzell Rhodes extérieures.

Autre exemple, celui de Sabine Steiner et de son mari Andreas Krebs, à Douanne: jusqu’en 2019, ils vinifiaient séparément les raisins de leurs domaines respectifs, sur le lac de Bienne, mais dès le millésime 2020, ils proposent une seule cuvée de leur malbec. «C’est une bonne alternative au pinot noir et il supporte bien le changement climatique, caractérisé par des années chaudes depuis 2009», explique la vigneronne.

Au premier rang, selon la surface, figure le vignoble vaudois, avec 4 ha (devant Argovie et Zurich, 3 ha chacun). A La Côte, plusieurs producteurs en proposent, tel Philippe Bovet, à Givrins — et consultant à Mendoza! —, qui l’élève trois ans en fûts de chêne, et Reynald Parmelin, à Begnins, qui le cultive en bio. C’est aussi, pour une part, le cas de Charles Rolaz, le patron de la maison Hammel. Il en a planté 2 ha sur les domaines de la famille, dans le Chablais, à La Côte et Lavaux, au domaine de La Boillattaz à Villette, membre de Lavaux-bio. Avec le millésime 2018, il a lancé une bouteille pluri-origine, en «vin de pays suisse», à l’étiquette flashy sérigraphiée «Wow!», en milieu de gamme.

«C’est une bonne alternative au pinot noir»


Le malbec va-t-il connaître le succès du merlot? Souvent, les mêmes vignerons-encaveurs ont planté les deux cépages. «Le malbec est un peu plus précoce que le merlot et son acidité est plus basse. Il produit des grappes lâches, mais ne supporte pas les fortes pluies. Il a tendance, alors, à pourrir rapidement. Il faut le planter dans des expositions ventilées, au sec et au chaud», conseille Andreas Meier. Voilà pourquoi il ne convient pas au Tessin! Quant au clone «suisse», va-t-il «booster» les plantations? Son avantage est d’être précoce: «C’est sans doute une souche, tirée de cinq ceps de plus de 80 ans, connus sous les noms de Plant Houdée ou de Côt précoce de Tours. Il est quinze jours plus avancé que les autres malbecs connus», précise le chercheur Jean-Laurent Spring, au centre de recherches de Pully-Caudoz. Proposé en matériel certifié depuis ce printemps, le cépage doit encore être multiplié par les pépiniéristes. Et il faut que cette offre nouvelle corresponde à une demande réelle des viticulteurs: réponse dans cinq à dix ans, pas avant.

(Pierre Thomas)


Davantage d’informations:

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