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Gelinaz, génial pop-up global

L’événement culturel planétaire change de formule et donne la parole aux chefs victimes de la pandémie. Aux Mossettes, Nicolas Darnauguilhem réunira amis et artistes pour un moment festif et décalé le 29 août.

L’événement culturel créé en 2015 par Andrea Petrini a essaimé sur tout le goble – ici Taipei. (Patricia Meunier)

La Paz, San Francisco, Oslo, Odessa, Singapour, Tokyo, Séoul, Berlin, Belfast New York, Lima, Brooklyn, Londres, Stockholm et, tiens tiens, Cerniat parmi la trentaine de hot spots de la planète Food; émergeant au milieu de quelque deux cents chefs impliqués, les noms plus familiers de Nicolas Darnauguilhem, Judith Baumann, Walter el Nagar, Marius Frehner… Chaud devant, The Grand Gelinaz Shuffle est de retour, rebaptisé Gelinaz Stay In Tour 2021. Autrement dit le remix, le grand brassage de cette sixième édition se fera in situ, sans quitter les fourneaux autrement que par le cœur et l’esprit et donnera à entendre les voix réduites au silence par le Covid.

Geli-what?

Créé en 2015 par l’homme de médias et de culture Andrea Petrini, Gelinaz entend célébrer le mariage de l’art et de la chère, faire dialoguer la créativité gastronomique contemporaine la plus débridée et des expressions culturelles les plus fécondes du moment. Simultanément et en tout point de la planète. L’Italo-Lyonnais Petrini est un des plus fins observateurs de la gastronomie mondiale, toujours sur le qui-vive, l’oreille au vent et la papille frémissante, défricheur de lieux improbables, découvreur de talents, globe-croqueur infatigable. On lui doit notamment (avec Joe Warwick) les éphémères et un brin iconoclastes Awards de la gastronomie – en suspens pour l’heure, faute de sponsor.

Porté par le petit cercle des meilleurs chefs du moment, le concept de départ ressemblait à une manière de loterie géante mondialisée où les acteurs tiraient au sort le lieu et le restaurant où ils atterriraient le lendemain afin de concocter un repas d’anthologie. Au nombre du collectif, les stars de la Food, de Rene Redzepi à Massimo Bottura ou d’Alex Atala à Magnus Nilsson. Le Péruvien Virgilio Martinez pouvait ainsi se retrouver projeté à l’improviste dans la cuisine d’Andreas Caminada (un des rares Helvètes du casting). Aujourd’hui, la pandémie est passée par là, semant dans son sillage fermetures, faillites, voire parfois réinventions. «Après une édition 2020 supprimée, celle-ci aura lieu dans un tout nouveau format qui en tient compte: finie la frénésie de voyages, seul l’immatériel voyagera de chef en chef et de table en table, les recettes ou plutôt leur canevas, les idées (matrix, selon l’expression choisie) voyageront», explique en substance Andrea Petrini.

Un événement aux Mossettes

Le concepteur de Gelinaz, qui avait eu dans les années 90 un immense coup de cœur pour Judith Baumann et l’atmosphère féerique des Mossettes, a naturellement suggéré à Nicolas Darnauguilhem – connu à son époque bruxelloise – de mêler celle-ci à l’édition 2021. A son tour, Nicolas a souhaité faire appel à deux autres chefs parmi les plus singuliers et créatifs de la scène helvétique actuelle, Marius Frehner (Gamper, Zurich) et Walter el Nagar (Fondation Mater, ex-Cinquième Jour, Genève).

«L’idée est toujours d’organiser un événement hors du commun, une expérience atypique, explique le cuisinier des Mossettes, qui a reçu en juillet son cahier des charges. Il y a une matrice à suivre mais aussi beaucoup de liberté entre les lignes et des contributions variables selon les chefs et artistes invités, afin de composer au final une œuvre collective unique. Une ambiance à créer autour de la table.»

Au programme, un menu en huit plats assorti de performances, en collaboration avec l’ensemble des créateurs. Le chef a désormais une fonction de curator, de chef d’orchestre ou de commissaire d’expo. «C’est un peu comme de réécrire un film ou une œuvre musicale à partir des esquisses ou des notes de quelqu’un d’autre», note Nicolas. Consigne numéro un aux participants, détricoter le canevas de base pour mieux le reconstruire. «Impossible de savoir qui fait quoi: seul indice, quelques ingrédients parfaitement exotiques qu’il s’agira de traduire différemment ou de remplacer par un concept local».

Un avenir incertain

Et les autres chefs? Ils œuvreront aux mêmes heures, ou à peu près, à San Francisco, New York, Berlin, Copenhague, Stockholm ou Séoul, si tout va bien côté virus. Quant aux voix silencieuses, ce seront notamment celles de Thomas Frebel, ancien du Noma à l’origine du fascinant Inua à Tokyo, fermé ce début d’année ou du Mexicain Sergio Meza qui s’apprêtait à ouvrir, précise l’organisateur. Qui cite Colombe St-Pierre, l’audacieuse installée à six heures de route de Montréal, contrainte à réinventer son resto en food-truck local, Pascal Barbot dans l’attente de son nouveau lieu à Paris ou Mauro Colagreco, qui a écrit ces recettes durant sa période de confinement.

«On a déjà vu beaucoup de fermetures et de disparitions, mais le pire est certainement à venir, avec les problèmes considérables de main-d’œuvre de toute la profession que la pandémie a encore accentués», relève Andrea Petrini. L’origine des recettes, l’identité de toutes ces voix silencieuses – ceux qui ont dû fermer en raison de la crise sanitaire, d’autres qui sont à nouveau confinés, dans l’incertitude ou l’attente de rouvrir leur établissement – ne seront révélées sur place qu’à l’issue de l’événement.

(Véronique Zbinden)


Davantage d’informations:

www.gelinaz.com
​​​​​​​www.lapintedesmossettes.ch​​​​​​​