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S.Pellegrino Young Chef Academy: le sacre d’une cuisine gourmande

Le Luxembourgeois Theo Kopp a remporté la finale régionale d’un concours auquel participaient quatre Suisses.

Mettre en lumière la créativité, l’engagement et la maîtrise technique des jeunes talents culinaires, tout en valorisant l’innovation et la durabilité: tel est l’objectif du concours S.Pellegrino Young Chef Academy, dont la finale régionale Europe de l’Ouest s’est tenue le 18 novembre à Vitznau (LU), sur les rives du lac des Quatre-Cantons. Parmi les dix finalistes issus de Suisse, de Belgique et du Luxembourg figuraient quatre professionnels helvétiques, dont la seule femme de la compétition, Clémentine Perradin, de La Pinte des Mossettes, à Cerniat (FR), accompagnée de son mentor, Nicolas Darnauguilhem. Elle était en lice aux côtés d’un autre Romand, Davide Rauco, de L’Aparté à Genève, et de deux candidats alémaniques, Tamas Czegledi, du restaurant Olivo au Grand Casino de Lucerne, et Emmanuel Sargenti Rojas, du Mandarin Oriental Savoy à Zurich. Tous ont livré une prestation impeccable, saluée par le jury, et auréolée de deux prix spéciaux (lire encadré).

La potée lorraine revisitée par Theo Kopp, rehaussée par un kimchi de mirabelle, lui a valu la victoire. (Photos dr)

Grande variété de techniques

Dès les premières heures de la journée, les candidats ont investi les cuisines du complexe Das Morgen, sous l’œil attentif de plusieurs caméras et de Christa Rigozzi, qui commentait la compétition pour les hôtes réunis dans la grande salle. Chacun disposait de cinq heures pour préparer son plat signature, et, sans thème imposé, les approches variaient grandement. Certains ont misé sur des plats végétaux, comme les raviolis de céleri rave ou l’association minimaliste de racines, œufs et agrumes. D’autres ont exploré la truite de Neirivue en habit feuillu ou le maquereau accompagné de shiitake. Les influences orientales et les traditions revisitées se sont aussi invitées: laitue grillée aux accents exotiques, potée lorraine au kimchi de mirabelle, dont l’odeur dominait en cuisine.


«Bien que toutes différentes, les créations peuvent être évaluées à travers leur goût et leur présentation»

Sylvia Manser, truube à gais (ar)membre du jury de dégustation


En cuisine, le visiteur curieux pouvait également croiser certains membres du jury de dégustation, comme Sylvia Manser, du Truube à Gais (AR). Aux côtés des autres jurés, sous la présidence de Franck Giovannini, du Restaurant de l’Hôtel de Ville de Crissier (VD), elle avait pour défi de juger des plats aux caractéristiques et inspirations très variées. Une gageure? «Même si chacun est venu avec son plat signature, il reste toujours possible d’évaluer les créations à travers le goût, la présentation et l’effort fourni. Sans oublier que l’histoire derrière le plat joue également un rôle clé.»

Davide Rauco (à dr.) avec Armel Bedouet de L’Aparté, à Genève.

Le caractère gourmand apprécié

Le storytelling occupe effectivement une place importante dans le concours. Juste avant la dégustation, chaque candidat présente son plat au jury, mettant en avant des aspects comme une approche zéro déchet (Davide Rauco), la richesse d’un potager maison (Clémentine Perradin) ou une passion pour un ingrédient particulier (Tamas Czegledi et son pigeon). Ce qui distingue également le concours, dans l’esprit du terme «Academy» qui est inclus dans son patronyme, est la liberté laissée aux jurés d’exprimer leurs impressions.

Clémentine Perradin et Nicolas Darnauguilhem de la Pinte des Mossettes.

Leur avis laisse entrevoir quelques indices sur le palmarès à venir, tout en mettant en lumière les qualités spécifiques de chaque plat. Il souligne par exemple la cuisson parfaite de la truite de Clémentine Perradin, la texture soignée de la création végane de Davide Rauco, la délicatesse de la sphère très umami d’Emmanuel Sargenti Rojas ou la saveur intense du pigeon de Tamas Czegledi. Un critère revient beaucoup dans les discussions: le caractère gourmand des assiettes, souvent mis en avant, notamment à propos du plat gagnant. Ce dernier aura su conjuguer technicité, créativité et émotion.

(Patrick Claudet)


Trois prix spéciaux en plus du titre

Clémentine Perradin (La Pinte des Mossettes) a remporté le Acqua Panna Award Connection in Gastronomy, attribué par les dix mentors. De son côté, Davide Rauco (L’Aparté) s’est vu remettre le S.Pellegrino Award de responsabilité sociale. Quant à l’Italien Davide Calabrese (Le Lappe Relais), il a reçu le Fine Dining Lovers Award Food for Thought.


«Un modeste plat paysan pour raviver mes souvenirs d’enfance»

Theo Kopp, vous avez remporté la finale régionale du S.Pellegrino Young Chef Academy et vous participerez en 2025 à la finale de Milan. Cette victoire, une surprise?
Oui, elle est un peu inattendue, dans la mesure où c’est le premier concours auquel je participe et qu’il y avait de très bons cuisiniers en lice. Moi qui suis né et qui ai grandi en France, c’est aussi une fierté de remporter cette victoire sous les couleurs du Luxembourg, le pays de mon père et celui où je m’épanouis en tant que cuisinier auprès de mon mentor, Cyril Molard, au restaurant Ma langue sourit (2 étoiles).

Pourquoi avoir choisi de revisiter la potée lorraine?
C’est l’un des premiers plats que j’ai créés, bien avant que je commence ma carrière de cuisinier, quand j’étais encore en études d’ingénieur. Ma femme est italienne, un pays que j’adore et dont chaque région ou presque a un plat ou une sauce emblématique. Je me suis demandé s’il y avait une spécialité typique de Metz, la ville de Lorraine où je suis né. Ma femme m’a mis sur la piste de la mirabelle, et c’est de là que tout est parti.

Plusieurs candidats ont proposé des plats véganes. Vous avez, pour votre part, choisi de travailler le porc. Pour quelle raison?
Le porc, c’est ce que ma famille produit depuis toujours, c’est ce que j’aime manger et c’est ce qui va sans doute me tuer un jour, le plus tard possible, je l’espère (rires). Le choix de ce modeste plat paysan est aussi une manière d’évoquer les souvenirs de repas de famille en Moselle.

Vous étiez ingénieur. Comment êtes-vous devenu cuisinier?
J’ai effectivement été ingénieur jusqu’en 2021, après quoi je suis parti voyager. C’est à La Réunion que ma reconversion a débuté, quand j’ai occupé un poste de commis dans un hôtel. A mon retour, j’ai travaillé à Metz, à Paris, à Lisbonne, au Pérou, en Colombie, au Luxembourg, et, tout récemment, aux Baux-de-Provence. En début d’année, je suis revenu au Luxembourg, près de ma Lorraine natale. Je l’ai fait pour ma famille, pour mes amis et pour me poser un peu.

(Patrick Claudet)


Davantage d’informations:

sanpellegrinoyoungchefacademy.com