Petit tour d’horizon des effets de la dernière ordonnance fédérale sur la branche et témoignages.
Les démarches sont longues, les formulaires complexes, le processus d’indemnisation toujours en décalage. Les témoignages de restaurateurs au lendemain de la nouvelle ordonnance du Conseil fédéral prolongeant la fermeture se ressemblent. Tous ont vu des collègues procéder à des licenciements, vu fermer telle auberge communale, tel bar du centre-ville, tel resto campagnard. Virginie Tinembart et Georgy Blanchet, qui ont ouvert leur délicieux petit Café Paradiso à Bulle voici deux ans, avaient de multiples projets. La troisième fermeture leur a fait l’effet d’une douche froide: «On a mis beaucoup d’énergie à lancer un système de vente à l’emporter, sans arriver à le rentabiliser vraiment. Par chance, on a bien travaillé en décembre mais au lieu de pouvoir rembourser l’emprunt et démarrer nos projets, on se retrouve à puiser dans les réserves.»
Avec ses deux établissements aux portes de Lausanne, Romano Hasenauer s’estime relativement chanceux, vu le contexte: «La Ville de Lausanne, propriétaire, a annulé les loyers des mois de fermeture. Nos 23 collaborateurs ont touché les RHT et nous avons pu compenser leur différence de salaire. Sur l’ensemble de l’année, on peut estimer à 25 % la baisse de chiffre d’affaires. Et pour échapper à l’ennui, nous lançons une gamme de plats cuisinés au Chalet-des-Enfants et un service de repas à domicile à Montheron.»
Début janvier, un sondage de Gastrosuisse estimait à 98 % la part des établissements tributaires d’aides financières; les trois quarts avaient alors déposé une demande et plus de 84 % avaient des collaborateurs en RHT. Après une première vague de licenciements entre novembre et décembre, plus de 58 % des entrepreneurs interrogés estimaient probables de nouveaux licenciements. Seuls 4 sur 10 annonçaient lors de l’enquête un chiffre d’affaires équivalent à 50 % au moins à celui de l’année précédente.
Après plusieurs communiqués alarmistes, prophétisant la faillite collective de la moitié de la branche, Gastrosuisse estimait enfin, à l’issue des annonces du Conseil fédéral du 13 janvier, que son appel à l’aide avait été entendu.
«La situation dans l’hôtellerie-restauration reste toutefois alarmante», nuance aujourd’hui Patrik Hasler-Olbrych, chef de la communication. La fermeture prolongée jusqu’à fin février signifie six semaines supplémentaires d’interdiction d’exercer, et ce «à une période synonyme de haute saison pour de nombreux établissements». Le versement des aides étant toujours du ressort des cantons, «l’essentiel est désormais de savoir à quelle vitesse les fonds destinés aux cas de rigueur seront versés», indique encore Patrik Hasler-Olbrych. Pour qui le montant alloué de 2,5 milliards de francs est clairement insuffisant. «On estime à quelque 30 % du chiffre d’affaires le montant nécessaire à payer les coûts fixes non couverts. La restauration a donc besoin de 600 millions de francs mensuels pour couvrir ses coûts fixes.»
(Véronique Zbinden)