Une tombée de cacao en plus, un nuage de sucre en moins et surtout plus de lait: le géant suisse du chocolat revoit sa recette et son identité visuelle.
«A qui allez-vous faire plaisir?» Tel sera le leitmotiv de la nouvelle campagne signée Cailler, déclinée dès la rentrée sur tous les tons, tous les médias, et tous les modes. Un slogan qui entend valoriser la nouvelle recette, le packaging revu et la certification IP Suisse fraîchement obtenue. La marque chocolatière qui fêtera ses 200 ans en 2019 planchait sur ce concept depuis deux ans. La nouvelle recette? Elle contient 16% de lait supplémentaire pour 6% de cacao en plus. Logiquement, le sucre a diminué. De 7%, précise Alessandro Rigoni, responsable de la division chocolat de Nestlé Suisse, en faisant observer la teinte légèrement plus foncée de la nouvelle tablette. En bouche, la différence n’est pas vraiment flagrante non plus. Techniquement, en effet, la part de lactose (soit de sucre) augmente avec la proportion de lait et au final le pourcentage de 31% de cacao obtenu – contre 29% dans la recette originelle – ne va certes pas amener les inconditionnels du noir à se convertir.
Mais là n’est pas l’important puisque les responsables de Cailler visaient davantage «l’évolution que la révolution». Evolution du packaging, qui porte désormais une petite poya à la façon des découpes traditionnelles de la région, dessinée par l’artiste fribourgeoise Marianne Dubuis. On se souvient de la polémique autour des nouveaux emballages conçus par Jean Nouvel à l’ère de Nelly Wenger, voici une dizaine d’années, et abandonnés en raison de leur impact environnemental. La collection est donc sobrement relookée, de manière à rester «immédiatement identifiable», tout en «se rapprochant de l’histoire de la marque».
Le sceau doré avec l’image de la Maison Cailler – «cet écrin au pied du Moléson » – le drapeau suisse et la mention «chocolat suisse depuis 1819» en attestent. «La Maison du Chocolat de Broc qu’ont visité plus de 411 800 visiteurs l’an dernier est un atout extraordinaire», souligne Alessandro Rigoni. Un autre logo s’y ajoute désormais, bien connu des consommateurs: la petite coccinelle de la marque IP Suisse se réfère à une production respectueuse de l’environnement et locale. Qu’est-ce à dire?
Quarante-quatre agriculteurs installés dans la région, dans un rayon d’une trentaine de kilomètres, livrent leur lait à la chocolaterie de Broc; tous sont certifiés IP Suisse, une des principales nouveautés sur lesquelles la marque entend communiquer. Le label à la coccinelle est synonyme d’une production locale, durable, écologiquement responsable. Nestlé achète leur lait à un prix légèrement supérieur à celui du marché, de quelque 4 centimes, mais ce partenariat est assorti d’un cahier des charges, aux termes duquel l’alimentation du bétail est principalement constituée d’herbages, le soja est proscrit (mais remplacé par d’autres concentrés de céréales) et un minimum de sorties en plein air est garanti. Ce «lait des prés» représente quelque 13 millions de kilos par année: il est transformé dans un délai maximum de quatre jours après la collecte. «L’utilisation de lait frais condensé – et non en poudre – est notre marque de fabrique, souligne encore Alessandro Rigoni. Nous sommes les seuls à transformer ainsi le lait, qui est à l’origine du goût signature de la marque Cailler.»
Ce partenariat avec IP Suisse renforce l’image de fraîcheur, proximité et durabilité de Nestlé qui s’engage par ailleurs à soutenir la biodiversité par le biais d’un catalogue de 35 mesures élaboré conjointement avec les scientifiques du Centre ornithologique de Semapoch, de l’Agroscope et du FIBL. «C’est une relance complète, se félicite Alessandro Rigoni. Cette nouvelle formule est le résultat d’un long processus de tests et de dégustations à l’aveugle auprès de consommateurs. La recette retenue a recueilli tous les suffrages, éclipsant à la fois les produits concurrents et les tablettes actuelles. » Et alors, à qui allons-nous faire plaisir?
(Véronique Zbinden)