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Une success-story suisse nommée Orfève

Leurs formidables chocolats bean to bar s’exportent désormais jusqu’aux Etats-Unis. Rencontre avec Caroline Buechler et François Xavier Mousin, deux autodidactes issus de l’horlogerie.

  • La philosophie des créateurs d’Orfève est proche des single malt: pas question d’assemblages. (photos Denis Hayoun)
  • Caroline cisèle la forme, tandis que François Xavier customise ses machines.

Côté cuisine, ils se sont fait une place à la table ou sur les chariots de desserts de quelques-uns des meilleurs chefs, de Philippe Chevrier à Dominique Gauthier et Serge Labrosse, mais aussi dans les épiceries de luxe. Surtout, leurs élégantes tablettes ivoire, frappées de lettres d’or, ont fait leur apparition sur les rayons de Cocoa Store, à Broadway, parmi les grands noms de la chocolaterie artisanale de luxe; leurs deux visages se retrouvent sur le site de l’adresse de référence états-unienne. Caroline Buechler, corpulence de liane et regard bleu outremer, François Xavier Mousin, le verbe clair et l’énergie des passionnés, sont à l’origine d’Orfève, première manufacture genevoise artisanale bean to bar – autrement dit, de la fève à la tablette.

Voici quelques années pourtant, ces deux autodidactes un peu barrés avaient créé l’indignation du très huppé quartier genevois de Champel, copieusement enfumé alors qu’ils testaient leur nouveau torréfacteur. Les deux lascars avaient alors migré en périphérie, remisant leurs expérimentations dans un pavillon de banlieue voué à la démolition.

Première tablette en 2017

Nous sommes en 2016 et les apprentis chocolatiers bricolent leur première liqueur de cacao à la façon des pionniers des microbrasseries. «Il nous a fallu un an et demi pour apprendre les bases du métier», notent les deux transfuges de la haute horlogerie. La première tablette véritablement aboutie voit le jour en 2017 dans leur pavillon de Thônex et c’est aussi l’année de la création de la marque Orfève. Sourçage et tri des fèves, torréfaction, broyage à la meule de pierre pour transformer le grué en liqueur de cacao; conchage à l’ancienne et enfin tempérage et moulage.

«Il nous a fallu un an et demi pour apprendre les bases du métier»

Caroline Buechler et François Xavier Mousin, à la tête d’orfève

On les retrouve aujourd’hui dans leur nouvel espace de la zone industrielle de Satigny, quelque 550 m2 complètement réaménagés, cloisonnés et équipés par leurs soins, réunissant l’administration, la production, le stockage et le conditionnement. La PME a entre-temps parcouru un chemin incroyable dans l’univers de l’artisanat de luxe, grâce à ce duo de choc.

La même vision du luxe

Elle? Caroline Buechler a grandi sur la Côte vaudoise, en provenance d’un pays qui n’existe plus, avec des parents fuyant la Tchécoslovaquie communiste; arrivée à l’âge de trois ans, en 1986, Caroline fait des études de sciences politiques, qu’elle finance grâce à un job dans l’import-export. Elle se voit journaliste ou avocate, mais commence par intégrer l’équipe marketing d’une rédaction, avant de se retrouver un peu par hasard dans l’horlogerie. «Au fond, je n’étais pas intéressée par le luxe, mais je rêvais déjà de créer quelque chose par moi-même.»

Natif de Sierre avec des origines belges, François Xavier Mousin a longtemps hanté les auditoires de différentes facs, avant de conclure par une paire de DEA en économie à l’Université de Genève, tout en travaillant dans le négoce de vins. Un coup de cœur pour un grand créateur horloger plus tard et le voilà propulsé directeur marketing «sans rien connaître au métier».

Un duo étonnant: peu conventionnelle déjà, leur première rencontre ne s’est pas faite via des amis ou un site, mais à l’occasion d’un entretien d’embauche dans l’horlogerie. Et c’est peut-être bien leur vision du luxe qui les a réunis: «Un concept creux, certainement pas une fin en soi, si vous n’avez pas l’amour du produit, du concret – qu’il s’agisse d’une grande complication ou d’un grand cru du Pérou.» Des rebelles du luxe, en somme. Ou quelque chose comme ça.

(Véronique Zbinden)


Davantage d’informations:

orfeve.com