La Fédération vigneronne vaudoise a tenu ses assises à Grandvaux, la semaine passée. On y a appris que la réforme des AOC devrait passer aux oubliettes.
Le président François Montet pouvait pavoiser devant «deux millésimes exceptionnels de suite» – 2023 devrait supplanter en quantité 2022. En 2023, l’estimation de la vendange est de 30 millions de litres, dont un petit tiers de vin rouge, contre 28,2 millions de litres et 69 % de blanc pour 2022. Olivier Mark, président de la Commission interprofessionnelle du vin vaudois (CIVV) est venu confirmer que les vignerons ne veulent pas d’une réforme des appellations d’origine vaudoise (AOC). Les vignerons de Lavaux, très remontés contre le projet, ont obtenu «à l’unanimité» du comité de la CIVV un maintien des six AOC régionales, et non qu’une AOC cantonale constitue un socle de la pyramide des vins vaudois, comme l’esquissait le projet de réforme mis en consultation. Les Vaudois sont les seuls en Suisse à penser ainsi, autorisant au passage le coupage des AOC régionales à hauteur de 60 % du nom principal et 40 % d’autre vin vaudois. Toutefois, la CIVV est d’accord de renforcer les «grands crus», qui seraient des vins purs, issus d’un seul lieu de production.
L’AOC générique Vaud, elle, serait assouplie pour «permettre de l’innovation», par exemple pour s’ouvrir aux cépages résistants aux maladies de la vigne. Sauf que, a-t-on appris par le président des pépiniéristes, Yves Cousin, la CIVV n’a pas été en mesure de se déterminer sur le catalogue de 41 cépages dits «robustes» dont l’Office fédéral de l’agriculture encourage la plantation par une subvention de 30 000 francs à l’hectare. Les vignerons vaudois sont dans l’expectative, alors que l’Etat du Valais a décidé, ce printemps, de ne promouvoir que le divico (rouge) et son jumeau, le divona (blanc), développés par Changins. De leur côté, les Vaudois se tâtent et prennent du retard: planté, un cep ne donne du raisin qu’après trois ans (à moins de surgreffer des plants existants).
La renonciation à une réforme des AOC sera-t-elle du goût du canton de Vaud? Avec toutes les précautions oratoires d’usage, Valérie Dittli, ministre de tutelle de la viticulture, a affirmé devant les vignerons vouloir moderniser le système des AOC, tout en assurant entendre les acteurs de la branche et garantir au consommateur l’origine du produit. Et le coupage toléré entre les AOC régionales, s’il est maintenu, n’assure pas cette transparence.
Michel Rochat, le président de l’Office des vins vaudois (OVV), qui a doublé son budget 2023 grâce au plan de relance de l’Etat (3 millions de francs de plus), est venu défendre ses activités de promotion, notamment pour faire connaître les vins vaudois en Suisse alémanique, où l’OVV est hôte d’honneur de la foire sur bateaux Expovina, jusqu’au 16 novembre, à Zurich. Parmi les vins présentés, l’Escargot rouge. Il s’en est élaboré 230 000 bouteilles depuis octobre 2021, soit 180 000 litres, à mettre en relation avec la douzaine de millions de litres de vin rouge vaudois produits en 2021–22. Avec du sucre résiduel, en deux versions, ce vin a été conçu pour les Alémaniques et force est de constater qu’il se vend d’abord en Suisse romande. Si Globus et Landi le vendent, Coop ne le proposera en rayon en Suisse alémanique que s’il obtient du succès en Suisse romande. Si le goût des Alémaniques est si différent de celui des Romands, comment comprendre ce prérequis?
(Pierre Thomas)