Après une édition 2020 virtuelle, la manifestation s’est tenue à Amsterdam, couronnant le Madrilène Dabiz Muñoz et plusieurs talents émergents.
Elle fait notamment suite à La Liste, OAD, plusieurs éditions du Michelin et précède de peu la tenue des World’s 50 Best Restaurants. Explosion des classements et autres palmarès au sommet de la gastronomie. La cérémonie des Best Chef Awards s’est déroulée ce 15 septembre à Amsterdam, en point d’orgue à deux jours de congrès associant science et gastronomie. La manifestation avait pour antienne cette année le retour attendu à la réalité – un propos assez réaliste, précisément, vu l’allègement des mesures sanitaires à Amsterdam. Quelque trois cents personnes ont dès lors pu se réunir dans des conditions (presque) normales entre l’ample terrasse couverte dominant les canaux et la halle géante de l’école professionnelle Het Sieraad.
Quelques notes de musique pour suggérer le suspense, la montée des applaudissements et le palmarès est dévoilé en commençant, bien sûr, par la fin. Le podium? Le chef de DiverXo, à Madrid, Dabiz Muñoz est sacré Meilleur Chef de l’année, précédant le Suédois Björn Frantzén (Frantzén, Stockholm) et un autre Espagnol Andoni Luis Aduriz (Mugaritz, San Sebastian).
Entre le centième et les premiers, de nombreuses distinctions spéciales aux noms des sponsors récompensent l’ensemble d’une carrière (Alfonso Iaccarino, les recettes de Don Alfonso 1890 ont fait florès de la Côte amalfitaine à Toronto) ou la meilleure pizza du monde (le Napolitain Franco Pepe en serait l’auteur); la Hongkongaise Vicky Lau obtient le Food Art Award, alors que la Brésilienne Manoella Manu Buffara est élue par les réseaux sociaux au chapitre de la relève talentueuse. La découverte la plus originale et intéressante du jour est sans doute celle de la jeune cheffe Fatmata Binta, en démonstration lors d’un atelier la veille. Originaire de Sierra Leone, région en guerre qu’elle a quitté pour s’installer à Accra, Ghana, Fatmata revisite le patrimoine de l’ethnie nomade Fulani et ses produits traditionnels: fonio, millet, moringa et autre baobab selon un concept de restaurant tout aussi nomade. Autre cheffe de grand talent, Masa Salopek, aux commandes de la pâtisserie de Hisa Franko, la toujours étonnante adresse slovène d’Ana Ros. Joan Roca obtient un prix pour l’aspect scientifique et innovant de son travail, alors que la meilleure progression est celle du Portugais Henrique Sà Pessoa et que le chef local couronné se nomme Joris Bijdendijk et cuisine dans le plus fameux musée d’Amsterdam le Rijks.
Les 100 heureux élus évoquaient un joyeux panachage de 29 pays et un intéressant état des lieux de la gastronomie actuelle. De rares Suisses y apparaissent, Andreas Caminada figurant au 19e rang, juste derrière Daniel Humm. La liste est en somme une version vaguement iconoclaste des World’s 50 Best Restaurants, dont elle s’inspire largement, en moins médiatisé et à quelques différences près quant aux modalités. La plupart des lauréats sont multirécompensés par ailleurs – des Espagnols Adonis Luiz Aduriz et Joan Roca, respectivement 3e et 4e, à Rene Redzepi qui leur emboîte le pas, en passant par Ana Ros, Maro Colagreco ou Alex Atala –, seul l’ordre d’apparition étant différent. Ce classement a aussi la particularité de ne pas distinguer chefs et cheffes et de récompenser un assez grand nombre de ces dernières. Le concept a été créé en 2015 par Joanna Slusarczyk, scientifique d’origine polonaise et Cristian Gadau, gastronome italien.
(Véronique Zbinden)