Le chef exécutif de l’Alpina Gstaad lance au Sommet by Martin Göschel (1 étoile Michelin) un menu à base d’ingrédients venant essentiellement de producteurs suisses.
De lui, on avait déjà beaucoup aimé le plat intitulé Le jardin des abeilles de l’Alpina, une truite pêchée dans la région de Gstaad et cuite en salle à 70° C dans la cire d’abeille provenant de la dizaine de colonies passant l’été dans les jardins du cinq-étoiles. Aujourd’hui, Martin Göschel, qui a démarré sa carrière au Bareiss de Claus Peter Lumpp (3 étoiles), à Beiersbronn, en Allemagne, franchit un cap supplémentaire; sa nouvelle carte est entièrement dédiée aux produits de sa patrie d’adoption, la Suisse, dont il a exploré les différentes régions pour en ramener les ingrédients de ses nouvelles créations. Ce recentrage indigène, d’autres l’ont opéré avant lui, mais la démarche n’en demeure pas moins atypique de la part d’un hôtel de cette catégorie, accueillant une clientèle suisse et internationale fréquentant les cinq-étoiles du monde entier, et privilégiant souvent la haute gastronomie dans son acception la plus classique. Le projet est soutenu par la direction, à commencer par le directeur général Tim Weiland, auquel succédera en mars prochain la Bernoise Nadine Friedli, mais aussi par les équipes de salle, fières de la nouveauté au moment des premiers services en décembre.
La touche helvétique prend d’emblée un tour ludique avec le beurre de Schönried façonné à la manière d’une bougie, dont la flamme se consume sous une cloche à côté du sel de Bex et du poivre du Valle Maggia. De Gstaad et de ses environs proviennent la majorité des produits (bœuf, lapin, caille, œufs, légumes d’hiver, fromage), mais les autres régions de Suisse ont aussi droit de cité, qu’il s’agisse des lacs de Zurich (perche), Thoune et Zoug (corégone), de Champvent (tempeh), Cormondes (escargots), Winterthour (okara) ou Oberdiessbach (fromage de noix de cajou). Un menu végétarien à sept plats complète l’offre présentée dans une carte au contenu didactique.
Le Sommet by Martin Göschel est l’un des quatre restaurants de l’Alpina Gstaad, qui domine la station bernoise. (dr)
C’est là en effet que l’on trouve une foule d’informations sur la provenance des ingrédients principaux. D’une part sous la forme d’une infographique ludique, dépliant la carte de la Suisse à la manière d’un itinéraire gourmand d’est en ouest; d’autre part à travers la présentation des fournisseurs avec lesquels l’Alpina Gstaad collabore, souvent depuis très longtemps. Parmi eux figure évidemment la boucherie Buure Metzg, qui possède son propre abattoir et trois boutiques, à Gstaad, Zweisimmen et Rougemont, ce qui en fait un partenaire incontournable des restaurateurs de la région. Plusieurs couples de producteurs sont aussi mis en avant, à commencer par Anna et Jonas Bach, dont le petit élevage en plein air de cailles est situé à quelques battements d’ailes de l’hôtel, ou encore Caroline et Fred Chautems, deux Lausannois à la tête d’une micro-entreprise qui produit son propre tempeh, fermenté artisanalement et à base de légumineuses suisses bios.
Et dans l’assiette? Martin Göschel démarre avec un trio d’amuse-bouches servi dans un écrin évoquant les sous-bois et dominé par les légumes-racines (boule de riz croquante à la crème de betterave, cookie meringué aux champignons, pickles de radis à la crème de persil). Parmi les plats du menu, citons le corégone avec marinade aigre-douce, sucrine grillée, caviar suisse (Oona Osietra Carat) et un surprenant espuma de rösti, ainsi qu’un duo de viande (filet de bœuf et râble de lapin) serti dans une feuille de blette, et servi avec un potimarron décliné en plusieurs textures. Au rayon des desserts, la revisite du sabayon à la pêche marinée, préparé en salle sur guéridon, ponctue le menu d’une touche de fraîcheur.
(Patrick Claudet)